Dr. Richard TINDJO : « Comme la majorité des Togolais, l’honorable TARGONE a fait campagne pour la Dynamique KPODZRO. Si c’est pour cela ils l’ont interpellé, ils doivent interpeller tout le monde »
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L’honorable Sambiri TARGONE, le président du parti les Démocrates Socialistes Africains (DSA), est arrêté le mardi dernier en compagnie du Dr Agbéyomé KODJO. Détenu depuis au Service central de recherche et d’nvestigations criminelles (SCRIC), il est privé de visite de sa famille et n’a pas droit à son avocat.
Le vice-président de son parti, Dr Richard TINDJO revient dans cette interview exclusive sur les conditions de l’arrestation du président du parti.
TOGO SCOOP: Vous êtes le premier vice-président du parti DSA, parti membre de la Dynamique Mgr KPODZRO. Votre premier responsable M. Sambiri TARGONE est arrêté le 21 avril dernier en compagnie d’Agbéyomé KODJO. Dites-nous dans quelle condition est intervenue sont arrestation ?
Richard TINDJO : C’est dans la soirée du lundi 20 avril 2020 que, le président du parti les Démocrates Socialistes Africains (DSA) Sambiri N’wakin TARGONE, était allé rendre visite au Dr Agbéyomé dans le but de lui apporter le soutien du parti.
Vous n’êtes pas sans savoir que depuis les élections présidentielles de février 2020 jusqu’à la proclamation des résultats, le Dr Agbéyomé était dans le viseur du pouvoir. Par la suite il y a une plainte entrainant la levée de son immunité parlementaire afin qu’il soit mis à la disposition de la justice. Ainsi, plusieurs invitations lui ont été envoyées pour comparaitre, mais compte tenu de son état de santé, il n’avait pas pu effectuer le déplacement.
C’est dans ce contexte que le président du parti DSA Sambiri N’wakin TARGONE s’est rendu à son domicile pour lui apporter le réconfort nécessaire.
Au faite, en se rendant à son domicile, son intention était de passer un petit temps avec lui et rentrer plus tard avant l’heure du couvre feu.
Malheureusement lorsqu’il avait décidé à prendre congé du Dr Agbéyomé et de ses hôtes, pour ne pas se retrouver coincé par le couvre-feu, qu’il apprend sur les réseaux sociaux que la maison du Dr Agbéyomé était déjà encerclée par les forces de l’ordre avec interdiction de sorties et d’entrées. Or, il n’était pas encore 20h, alors il décida de joindre sa femme et ses enfants et leur notifier qu’il ne pouvait plus rentrer compte tenu de l’interdiction de sortie et d’entrée.
N’ayant plus d’alternatives, le président Sambiri N’wakin TARGONE a décidé passé la nuit au coté du Dr Agbéyomé et ses hôtes.
Le lendemain matin c’est-à-dire le 21 avril 2020, il décida de rentrer et fît appel à son chauffeur. Ce dernier n’était pas encore arrivé sur les lieux quand il a rappelé la famille pour leur dire que c’était impossible de franchir les barrières des forces de l’ordre et qu’il parait que tout le quartier était aussi bouclé. Ainsi, toutes les tentatives pour rentrer chez lui étaient vaines.
Quelques minutes plus tard, ils ont entendu des bruits assourdissants, c’était le portail que les forces de l’ordre tentaient de démolir pour y entrer. Une fois sur les lieux, ils ont été tous embarqués sans qu’il ne puisse informer de nouveau sa famille de ce qui se passait.
Jusqu’au soir, la famille n’ayant plus de ses nouvelles m’a fait appel en me disant que tous ces portables étaient inaccessibles et elle n’avait plus de ses information pourtant il était chez le Dr Agbéyomé depuis hier. J’ai tenté de les rassurer en promettant de leur revenir avec des informations à l’issue des investigations. Il ressort de mes investigations qu’il était gardé au Service Central de Recherche et d’Investigations Criminelles (SCRIC) avec d’autres personnes aussi interpellées.
TOGO SCOOP : Pourquoi peu d’information ont circulé sur l’arrestation de votre responsable ?
Richard TINDJO: Je ne saurai le dire avec certitude, mais le constat que j’ai pu relever depuis l’adhésion à l’idée de la Dynamique Kpodzro, est que toute la communication qui se passe au sein de cette Dynamique est focalisée sur la personne du Dr Agbéyomé et certains responsables de partis politiques membres; pourtant le président Sambiri N’wakin TARGONE est aussi chef de parti politique au même titre que ses collègues et fait un travail remarquable dans la zone nord.
Pendant la campagne présidentielle, vous vous rappelez de la manière dont les militants du parti DSA ont su tenir tête à ceux de UNIR dans la préfecture de Dankpen lorsque ceux-ci avaient bloqués la route avec les véhicules pour empêcher l’entrée du candidat Dr Agbéyomé ? Ce petit exemple illustratif pour dire que le travail sur surtout au nord n’est pas facile surtout quand on est un parti de l’opposition.
Je rappel au passage qu’aux dernières élections municipales, le parti DSA a même plus de conseillers que certains partis membres de la Dynamique pourtant on communique peu sur la personne de TARGONE et son parti.
Dans cette affaire d’arrestation, il a fallu aussi qu’une de nos responsables essaie d’insister au niveau d’un proche du Dr Agbéyomé afin d’obtenir les informations sur ce qui s’est réellement passé après qu’on avait plus des nouvelles du président Sambiri N’wakin TARGONE dans la journée du 21 avril 2020.
Est-ce un mépris ou une exploitation de son image qui intéresse, je crois que chacun doit pouvoir faire ses propres analyses sur la base de ses observations, constats et tirer une conclusion.
TOGO SCOOP : Depuis son arrestation, est-ce que vous avez pu le rencontrer ? Quel est son moral ?
Richard TINDJO : Dans la journée du 22 avril 2020, j’ai fais plusieurs fois le tour au niveau du Service Central de Recherche et d’Investigations Criminelles (SCRIC) pour m’enquérir de ses nouvelles, malheureusement, ils ne m’ont pas permis de le voir. Toutes les tentatives que son épouse et moi avions fait pour rencontrer le président Sambiri N’wakin TARGONE étaient vaines.
Le matin autour de 8h, les forces de l’ordre au portail nous disaient que les heures de visite souvent c’est entre 7h et 8h, 11h30 à 12h et l’après-midi entre 16h et 17h.
Ayant raté l’heure de visite prévue pour 7h et 8h, nous avons attendu jusqu’à 11h30 pour se présenter de nouveau, c’est là qu’ils nous font savoir que les consignes ont encore changé, c’est impossible de rentrer, de revenir entre 16h et 17h. Nous étions obligés de repartir à la maison pour revenir à 16h.
A 16h, je me présente de nouveau et ils me disent qu’ils ont reçu la consigne de ne faire entrer personne sauf la famille du Dr Agbéyomé.
Ne comprenant rien, j’ai demandé si les autres n’avaient pas de famille, ils m’ont répondu que c’est la consigne reçue ils ne peuvent rien, alors je leur ai dis merci et promis revenir le lendemain.
Au sujet de son état psychologique, je ne peux rien dire, puisque je n’ai pas pu le rencontrer. L’essentiel pour moi qu’il sorte de là et retrouver sa famille et ses proches.
TOGO SCOOP: Que lui reproche-t-on ? A-t-il eu accès à son avocat ?
Richard TINDJO : Franchement n’ayant pas pu le rencontrer, il est difficile de savoir ce qu’on lui reproche. Est-ce parce qu’il était dans la maison au moment de l’arrestation du Dr Agbéyomé ou c’est parce qu’il est membre de la Dynamique ?
C’est quand j’aurai l’occasion de discuter avec lui que j’aurai plus de précisions. A ce que je sache, il a fait la campagne pour la Dynamique Kpodzro comme la majorité des togolais et si c’est pour cela qu’ils l’ont interpellé alors tous ceux qui ont fait la campagne pour le compte du Dr Agbéyomé pourraient aussi être interpellés.
Tout ce que je pourrais dire est qu’il est au Service Central de Recherche et d’Investigations Criminelles (SCRIC) pour les renseignements, et pour le moment il n’avait pas encore accès son avocat.
TOGO SCOOP : Pensez-vous que le pouvoir a des arguments solides pour faire condamner les responsables de la Dynamique ?
Richard TINDJO: Dire que le pouvoir a des arguments solides pour faire condamner les responsables de la Dynamique, je ne pense pas. Pendant la campagne présidentielle, nous avons tous vu à travers les vidéos sur les réseaux sociaux aussi du côté du pouvoir les responsables et militants du parti au pouvoir posés des actes qui sont aussi punissables par la loi. Pourquoi eux ne sont pas inquiétés et c’est seulement ceux de la Dynamique qui devraient faire l’objet d’interpellation ?
Pour être juste et équitable dans la démarche, il faudrait que ceux du parti au pouvoir qui ont posés des actes condamnables soient interpellés et écoutés au même titre que ceux de la Dynamique Kpodzro à moins qu’on soit dans la morale de « la fable du loup et l’agneau » de la Fontaine où « la raison du plus fort est toujours la meilleure ».
Le loup (le fort) justifie sa prétention à manger l’agneau (le faible) par des “raisons” dont l’agneau montre successivement l’absurdité. Cela n’empêche pas le loup de finalement manger l’agneau.
Le loup, de fait, a eu raison de l’agneau, mais avait-il raison de le manger, en avait-il le droit ?
En fait en Droit, ce qui est insupportable, ce n’est pas tant que le loup mange l’agneau sous le règne naturel de la “loi de la jungle”, mais que le loup de la fable veuille de surcroît avoir le droit de le faire.
Y a-t-il un droit du plus fort ? Si le loup de la fable l’emporte, est-ce grâce à ses raisons ou grâce à sa force ? Si le fait d’être le plus fort suffit à justifier le loup, qu’importent ses raisons?
Comme le fait remarquer Rousseau, dans la notion de “droit du plus fort”, la force fait tout, le droit n’est rien: « Puisque le plus fort a toujours raison, il ne s’agit que de faire en sorte qu’on soit le plus fort ».
Qu’est-ce qu’avoir raison ? Est-ce avoir des raisons qui sont plus justes que celles de son adversaire, ou avoir raison de son adversaire parce qu’on est plus fort que lui ?
Pascal fait lui aussi remarquer que la justice devraient être forte, mais que, malheureusement, c’est la force qui se fait passer pour juste.
Tout porte à croire que nous sommes dans le réalisme politique de Machiavel où « la fin justifie les moyens ».
Un habile législateur, qui entend servir l’intérêt commun et celui de la patrie plutôt que le sien propre et celui de ses héritiers, doit employer toute son industrie pour attirer à soi tout le pouvoir. Un esprit sage ne condamnera jamais quelqu’un pour avoir usé d’un moyen hors des règles ordinaires pour régler une monarchie ou fonder une république. Ce qui est à désirer, c’est que si le fait l’accuse, le résultat l’excuse ; si le résultat est bon, il est acquitté ; tel est le cas de Romulus. Ce n’est pas la violence qui restaure, mais la violence qui ruine qu’il faut condamner.
Le législateur aura assez de sagesse et de vertu pour ne pas léguer à autrui l’autorité qu’il a prise en main : les hommes étant plus enclins au mal qu’au bien, son successeur pourrait bien faire mauvais usage de l’autorité dont pour sa part il aura bien usé ; d’ailleurs un seul homme est bien capable de constituer un État, mais bien courte serait la durée et de l’État et de ses lois si l’exécution en était remise aux mains d’un seul ; le moyen de l’assurer, c’est de la confier aux soins et à la garde de plusieurs.
TOGO SCOOP : Comment les militants du parti vivent cette situation ?
Richard TINDJO :Les militants du parti ont le moral haut puisque nous leur demandons de s’abstenir de toute forme de violence et de garder leur calme en ce moment où le pays traverse une crise sanitaire. Faudrait que chacun reste chez lui et observe les mesures barrières et laisser la justice faire son travail. Nous sommes convaincu que le président du parti DSA tout comme les autres seront relâchés dans les jours à venir, c’est juste pour des besoins d’enquête qu’ils sont encore retenus au Service Central de Recherche et d’Investigations Criminelles (SCRIC). Nous comptons sur le professionnalisme de toutes les structures impliquées pour trouver une solution afin que la sérénité revienne dans tous les états major des partis politiques et dans le pays.
Ce qui doit nous préoccuper tous aujourd’hui c’est comment dans un élan de solidarité réussir à combattre cet ennemi invisible du COVID19 qui n’épargne personne.
TOGO SCOOP: Quelle sortie de crise entrevoyez-vous pour notre pays ?
Richard TINDJO : Je pense personnellement qu’il faut tourner la page des élections présidentielles et faire face aux défis qui nous attendent. L’un des défis c’est comment sortir le pays de l’impasse socio économique crée par le COVID19 et renforcer la résilience des populations.
L’autre défi c’est comment régler la crise de confiance entre acteurs politiques et baliser le chemin de l’alternance pacifique au Togo en 2025.
Au nom de la paix et de la solidarité, le président de la république doit privilégier le règlement politique de cette affaire et faire appel à tous les acteurs politiques et de la société civile à participer à la mobilisation pour la reconstruction et le développement inclusif du Togo.
Le Togo a trop souffert des conséquences des crises socio politiques au point où certaines priorités semblent être oubliées.
Allez voir un peu l’état dans lequel se trouvent nos hôpitaux et dispensaires du Nord au Sud du pays, allez aux CHU Campus, Sylvanus Olympio voir les conditions d’hospitalisation des malades (surtout au niveau de la pédiatrie, les bébés sont à trois ou quatre sur le même lit) et des accompagnants (qui dorment à même le sol avec les sacs) en ce moment de la crise sanitaire où le risque de contamination est très élevé.
Une fois le tour effectué, vous allez comprendre que la priorité n’est pas l’affaire de Agbéyomé mais l’investissement dans le domaine de la santé, du social et bien d’autres secteurs pour le renforcement de la résilience de la population. Il y a tellement de défis qu’il vaut mieux s’occuper de ces défis que de continuer par harceler la Dynamique Kpodzro. Nous sommes tous les enfants d’un même pays, raison de plus pour privilégier le dialogue dans toute situation visant à compromettre la paix, l’unité, la solidarité et la cohésion sociale.
Notons que pour éviter le coronavirus, il est recommandé de se laver fréquemment des mains au savon ou avec une solution hydro-alcoolique, éviter les poignées de mains, les accolades et les embrassades.
Interview réalisée par TOGO SCOOP
E-Mail : togoscoop@gmail.com