L’Etat togolais a-t-il vendu la poule aux œufs d’or qu’était la Nouvelle société cotonnière du Togo (NSCT) ? Tout porte à le croire vue l’indignation qui couve dans le secteur ces derniers temps. Ce mécontentement émane d’un des acteurs et non des moindres de la filière coton au Togo. Détentrice de 24% des actions de la nouvelle société désormais dirigée par le groupe singapourien Olam, la Fédération nationale des groupements de producteurs de coton du Togo (FNGPC Coop) exige le départ de Olam. Devant la presse le samedi 8 juin 2024, la Fédération l’a encore martelé.
Le 29 juin 2020, l’assemblée nationale autorise la cession de 51% du capital de la NSCT à Olam. En cédant sa part à ce groupe, les autorités togolaises nourrissaient une noble ambition pour le secteur. Il s’agit notamment de : doubler les rendements, optimiser l’utilisation des intrants, mécaniser et motoriser raisonnablement les terres par la réduction du pourcentage des superficies travaillées manuellement de 55 à 60%, raffermir l’encadrement avec un ratio d’appui conseil un (1) conseiller agricole pour 400 producteurs contre un (1) conseiller pour 1300 environ actuellement, moderniser l’outil industriel, développer la marque “coton made in Togo“…
Trois ans après cette cession, le bilan est un fiasco. A en croire les producteurs. Ils n’en veulent pour preuve que la diminution de la production qui est passée de 110 000 tonnes pour la campagne de 2019 à 2020, à 68 000 tonnes en 2020 à 2021. La campagne suivante est passée à 56 000 tonnes et la dernière celle de 2023 à 2024 est chiffrée à 67 700 tonnes. A contrario, alors que la production diminuait au Togo, sur le marché international, le prix pratiqué augmentait. Ce prix, en effet, est passé de 1050 à 2050 F. Malgré cela, Olam ne l’a pas répercuté aux producteurs togolais.
Les producteurs dénoncent le mépris que Olam affiche à leur endroit alors qu’en tant que producteurs et actionnaires de la société, ils méritaient mieux. « Olam ne fait que ce qui lui passe par la tête. Il ne nous écoute pas », a fustigé Kourouféi Koussouwè, le président du Conseil d’administration du FNGPC COOP-CA.
L’opacité et le flou qui entourent la gestion de la société par Olam sont également passés au peigne fin. « Les prix (NDLR : du coton et des engrais) sont flous. Nous ne savons pas sur quels critères ou bases ils sont fixés », martèle-t-il. Et de poursuivre : « Depuis qu’ils sont arrivés, ils ont dissout toutes les commissions (commission audit interne, commission vente de coton fibre, commission de fixation de prix…). C’est eux seuls qui gèrent tout et à la fin ce qu’ils nous donnent n’est rien ».
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Depuis l’arrivée de Olam, souligne-t-il, « aucun producteur n’a reçu un franc comme bonus à la fin de la campagne malgré la hausse du prix du coton fibre ». Le Groupe est acheteur et vendeur. Au niveau de la passation des marchés, c’est lui qui gère les intrants avec un seul fournisseur alors qu’avant les achats passaient par la passation de marché où le choix se fait entre plusieurs fournisseurs.
En trois ans de présence au Togo, la gestion de Olam laisse à désirer. Trois ans de gestion singapourienne a laissé une addition salée de 14 milliards de dette qu’il estime doit être payée par l’Etat et les producteurs. « Ils nous affichent une dette de plus de 14 milliards et disent que c’est à l’état et aux producteurs de payer cette dette qu’eux-mêmes ne sont pas dedans. Est-ce que c’est l’état et les producteurs qui ont géré la filière », s’interroge Kourouféi pour qui, il ne devrait pas y avoir de dette si la société était bien gérée.
« Sur nos comptes au Togo, il n’y a aucun franc. Nos actions sont ailleurs. Ils ont mis tout dans les pays voisins. On ne sait pas si nos banques ne peuvent pas faire des intérêts. On en a assez, il faut que Olam dégage ! Olam doit partir. Il faut que Olam parte. On va travailler avec l’Etat comme on le faisait avant », a martelé Kourouféi qui a appelle l’Etat à prendre ses responsabilités.
D’ailleurs, dans ce sens un courrier a été adressé au président de la République avec des doléances de la Fédération. Si ce dernier n’accède pas à leurs revendications, les producteurs menacent de hausser le ton. Ira-t-on jusque-là ? La suite nous édifiera…
Albert AGBEKO
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