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Dans une société togolaise en perte de repères où tous les pouvoirs (exécutif, législatif, judiciaire, militaire, économique et financier et même les diplomates en poste à Lomé) sont concentrés dans la main du clan au pouvoir, l’église qui, reste la seule force morale se doit de se démarquer ouvertement de l’oppresseur. Elle ne doit pas jouer à l’équilibrisme.
Cette force morale qu’est l’église, en qui croient encore bon nombre de Togolais doit être la lumière et le guide qui doit éclairer les citoyens togolais dans notre société où la corruption, la gabegie et les détournements sont promus aux normes de valeur. Elle doit conseiller, interpeller et avertir, mais quand il le faut sanctionner. L’église ne doit faire de compromission avec le Mal d’où qu’il vienne. Mais trop souvent, dans notre pays, l’église a décidé de se taire. Un silence qui est synonyme de bénédiction pour le Mal. Puisque dans un système d’oppression, choisir de se taire, c’est choisir le camp de l’oppresseur. Malheureusement, tel est le cas de plusieurs confessions religieuses togolaises qui, pour continuer par profiter des multiples avantages de leur manque de courage, ont choisi le silence.
Les grandes confessions religieuses togolaises à l’instar de l’Eglise des assemblées de Togo, les Pentecôtes du Togo, la Convention baptiste du Togo, … ne sont jamais senties au milieu de leur peuple, la longue et lancinante crise que traverse ce peuple depuis plusieurs décennies ne leur dit rien au point qu’elles se sentent concernées ou interpellées. Face aux répressions, à l’assassinat parfois des mineurs, à l’exil, aux incendies criminels, à l’emprisonnement parfois d’innocentes personnes,…quand mêmes les signaux étaient rouges et risquaient de mettre en péril les fondements mêmes de la nation togolaise, ces églises ne se sont inquiétées au point de sortir de leur silence et en tant que berger sonner sur la sonnette d’alarme. Leur silence, le peuple togolais, en quête de liberté et de justice, de démocratie et de respect des droits de l’Homme, s’en est accoutumé. Il sait que dans cette lutte, il ne peut compter que sur lui et lui seul pour se défaire de cette dictature.
Mais quand l’Eglise catholique décide de briser à sa manière le silence, on préférerait qu’elle garde son mutisme d’antan car son silence vaut mieux que ses mots. Il est inconcevable que dans un système qui opprime, emprisonne et tue même des enfants, qu’on puisse jouer à l’équilibrisme. Dans un tel système, renvoyer dos à dos et le bourreau et la victime, c’est faire le jeu du bourreau. C’est comme sous le règne du régime nazi en Allemagne, on rendait les victimes responsables de leur situation. C’est en cela qu’il faut comprendre malencontreuse sortie des évêques du Togo.
On arrive à publier une telle déclaration quand on a peur de dire la vérité, quand on a peur d’offenser, quand on a peur de perdre des prestiges. Or, tel n’est doit pas être le rôle des Hommes de Dieu. Ils ont fait le choix de la justice et de la vérité. Au péril de leurs vies, les bergers ne doivent pas renoncer à la vérité, d’être au côté des opprimés, des sans voix. C’est ce que les évêques de la République démocratique du Congo (RDC) nous ont montrés ces dernières années.
Mais au Togo, les évêques font une mauvaise lecture de la situation sociopolitique au Togo en voulant réduire la crise togolaise entre une opposition qui veut conquérir le pouvoir face à un pouvoir qui s’arc-boute. Mais la crise togolaise est une lutte du peuple togolais pour plus de justice et de liberté. Les récentes manifestations dans le pays et dans la diaspora l’ont démontré clairement. Ce mépris des aspirations profondes d’un peuple en quête de liberté et du bien-être n’est pas un signe de progrès. Mais traduit le non respect d’un des droits inaliénables d’un peuple : le droit à l’autodétermination.
Le problème du Togo est le refus d’alternance
En quoi l’opposition est responsable, quand en 1998 le pouvoir s’entend à sa défaite cuisante et imminente a fait arrêter le processus électoral et a fait programmer le Général Eyadema vainqueur du scrutin par des voies détournées. En quoi l’opposition est responsable quand en 2005, à la mort du Général, au lieu de faire respecter la constitution, avec la bénédiction d’un quarteron de Généraux, on a tripatouillé la Loi fondamentale de la République pour permettre au fils du défunt de succéder à son géniteur ? En quoi l’opposition est responsable en 2010 quand avant même que le dépouillement n’est terminé la CENI a proclamé un vainqueur à ce scrutin ?
Le problème du Togo n’est pas l’opposition mais c’est le refus du jeu démocratique du camp en face. Et ça nos évêques ne doivent pas l’ignorer. Tant que le pouvoir ne marquera pas sa volonté à respecter la volonté du peuple, c’est en vain que l’opposition mobilisera. Elle butera toujours contre le cache-sexe du pouvoir qui est l’armée qui détient en réalité le pouvoir. Cela nos évêques ne devraient pas ne pas l’ignorer. Car le problème du Togo n’est pas l’opposition mais l’absence de volonté du pouvoir à jouer le jeu démocratique. L’exemple palpable de cette absence de volonté politique du pouvoir est son refus d’opérer les réformes malgré l’appel de toutes les composantes de la nation y compris la Conférence des évêques du Togo.
Face à un tel pouvoir qui concentre l’essentiel des pouvoirs d’Etat entre ses mains, que peut faire une opposition dont la seule force n’est que l’arme populaire. Mais si devant cette force disproportionnée, les évêques aussi décident de s’y joindre autant dire que Dieu a aussi choisi le camp des oppresseurs.
Francine DZIDULA
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