Femme politique et entrepreneure, Grâce Bikoni Koumayi a été arrêtée hier, vendredi 6 juin 2025, alors qu’elle manifestait pacifiquement, aux côtés de plusieurs jeunes engagés.
Par ces quelques mots, je tiens à rendre hommage à cette battante, cette femme de cœur et d’action.
J’ai fait la connaissance de Grâce lorsqu’elle était membre du bureau de l’Association des sages-femmes. Très impliquée dans les préparatifs du congrès de l’association, son dynamisme et sa vivacité m’ont immédiatement marqué. C’est à cette époque que nous avons noué des liens d’amitié.
Plus tard, elle s’éloignera de l’Association pour se lancer dans ses propres initiatives plus personnelle et audacieuse. La fille de Gerry — comme j’aime l’appeler — elle crée sa propre structure avec un mot d’ordre : « Faire autrement l’accouchement », qui est aussi le nom de son association. Elle y milite activement contre les violences obstétricales et gynécologiques, en particulier lors des consultations prénatales et des accouchements. Grâce accompagne aujourd’hui de nombreuses femmes enceintes, souvent à domicile, avec une attention rare et une bienveillance sans faille.
Derrière son sourire lumineux et sa joie de vivre communicative, Grâce a connu son lot d’épreuves. Mais elle n’a jamais laissé les difficultés la détourner de son chemin. Femme de convictions, profondément engagée, elle croit en ses capacités tout en assumant avec humilité ses faiblesses.
Ces dernières semaines, j’ai visionné deux reportages qu’elle a réalisés à Atakpamé et à Pya. J’ai été touché. Grâce a su, mieux qu’un professionnel des médias, avec des mots justes et simples, révéler ce que nos habitudes nous empêchent souvent de voir. Je n’ai pas manqué de lui témoigner mon admiration.
Grâce, c’est aussi une âme généreuse, une amie fidèle. Je me souviens encore de ce geste qui m’a profondément touché. Lorsque j’ai été agressé et que mon matériel de travail a été confisqué à la rencontre du député sénégalais Guy-Marius Sagna, elle a été l’une des rares à réagir immédiatement. Le lendemain, elle est venue me voir au bureau, avec l’un de ses téléphones en main : « Albert, prends ça, en attendant de trouver les moyens de t’en acheter un autre », m’a-t-elle dit.
Devant mon refus, elle a insisté. Puis, avant de partir, elle m’a offert le déjeuner.
Trois jours plus tard, elle est revenue avec une enveloppe de 20 000 F CFA : « C’est ma contribution pour t’aider à racheter un téléphone », a-t-elle soufflé.
Ce geste restera gravé dans ma mémoire, d’autant plus que je connais sa situation. Elle est la seule, sur tout le territoire national, à m’avoir exprimé une telle affection, quand les organisateurs de la conférence de presse durant laquelle j’ai été agressé ne m’ont même pas passé un coup de fil. Pire, la DMP a rayé mon nom de la liste des journalistes agressés, au motif que je les critique…
Grâce est une femme droite. Elle ne fait jamais rien contre sa volonté. Si quelque chose va à l’encontre de ses convictions, elle prend ses distances sans hésiter.
Comme elle, celles et ceux qui ont été arrêtés ne sont ni des fauteurs de trouble ni des déséquilibrés, contrairement à ce qu’on tente de faire croire. Parmi eux se trouvent des jeune médecin, sage-femme, pharmacien, étudiant, vidéaste… Tous nourrissent de véritables ambitions pour leur pays.
Ils ne sont pas fous. Ils veulent simplement croire que leur pays peut leur offrir l’opportunité de le servir.
Ces jeunes, pleins d’avenir, n’ont rien à faire en prison. Ne brisez pas leurs vies. Donnons-leur l’espoir de continuer à croire en ce pays. Libérez-les.
PS : J’invite les proches ou connaissances de toutes les personnes interpellées à me contacter. Je souhaite réaliser des portraits à publier dans les prochains jours sur Togo Scoop.
📞 Contact : 90 96 63 64 / 99 56 57 99.
