La filière de la noix de cajou au Togo traverse actuellement une crise majeure, mettant en péril sa viabilité économique. Deux problèmes principaux sont à l’origine de cette situation préoccupante : le retard du lancement de la campagne de commercialisation et le détournement de la période moratoire. Ces dysfonctionnements pénalisent les acteurs honnêtes du secteur et nécessitent une intervention urgente des autorités compétentes pour rétablir l’équité et la transparence.
1. Retard du lancement de la campagne de commercialisation
Cause
Le lancement de la campagne de commercialisation, initialement prévu plus tôt, a été reporté sans justification claire, créant ainsi un climat d’incertitude pour les agrégateurs et les producteurs.
Conséquences
Immobilisation des stocks : Les agrégateurs et producteurs ont dû conserver leurs stocks pendant une période prolongée, engendrant des coûts de stockage supplémentaires et des pertes financières importantes.
Perturbation de la chaîne de valeur : Le retard a désorganisé les plans de commercialisation et a eu un impact négatif sur les revenus des acteurs de la filière.
Risque de détérioration de la qualité : Une conservation prolongée des noix de cajou peut entraîner une baisse de leur qualité, réduisant ainsi leur valeur marchande.
2. Détournement de la période moratoire
Contexte
Après le lancement officiel de la campagne le 13 mars 2025 à Kara, une période moratoire de trois semaines (jusqu’au 3 avril 2025) a été instaurée pour empêcher l’exportation des noix de cajou vers Lomé. Toutefois, cette mesure est contournée par certains acteurs, créant un déséquilibre dans la filière.
Problèmes observés
Livraisons illégales : Certains agrégateurs livrent déjà leurs camions de noix de cajou avant la fin de la période moratoire, générant ainsi une concurrence déloyale et faussant le marché.
Corruption aux postes de contrôle :
Des camions parviennent à passer les postes de contrôle de Djerewoue et de Tsévié malgré les restrictions en vigueur.
Des pots-de-vin de 200 000 FCFA par camion seraient versés aux contrôleurs, avec une possible complicité de responsables de la filière (CIFAT Togo et 3A Togo).
À Lomé, des frais supplémentaires allant jusqu’à 1 million FCFA seraient exigés pour le déchargement.
Conséquences
Pénalisation des acteurs honnêtes : Les agrégateurs respectant les règles sont désavantagés et risquent la faillite en raison de l’immobilisation de leurs stocks.
Flambée des prix : L’augmentation des prix des noix de cajou affecte négativement l’ensemble de la chaîne de valeur et réduit la compétitivité du secteur.
Perte de confiance : Ces pratiques sapent la confiance des investisseurs et des partenaires internationaux dans la filière togolaise de la noix de cajou.
Demande d’action
Face à cette situation critique, plusieurs mesures doivent être mises en place pour garantir la pérennité de la filière :
1. Enquête approfondie
Identifier et sanctionner les responsables des contournements de la période moratoire et des actes de corruption.
Examiner les raisons du retard du lancement de la campagne et proposer des solutions pour éviter de tels retards à l’avenir.
2. Intervention des autorités
Les ministères du Commerce, de l’Agriculture et de l’Économie doivent prendre des mesures pour rétablir l’équité dans la filière.
Réviser la période moratoire pour éviter de pénaliser les opérateurs économiques honnêtes et garantir une concurrence saine.
3. Renforcement des contrôles
Mettre en place des mécanismes de surveillance renforcés aux postes de contrôle pour empêcher les livraisons illégales.
Sensibiliser et former les agents de contrôle pour lutter contre la corruption.
4. Soutien aux acteurs honnêtes
Accorder des compensations financières ou des allègements fiscaux aux agrégateurs et producteurs ayant subi des pertes en raison du retard de la campagne.
Faciliter l’accès au crédit pour les acteurs respectueux des règles afin de les aider à surmonter les difficultés actuelles.
En conclusion, la filière de la noix de cajou au Togo est à un tournant critique. Si les problèmes actuels ne sont pas résolus rapidement, ils risquent de compromettre les efforts de développement du secteur et de marginaliser les acteurs honnêtes. Une action concertée des autorités et des parties prenantes est essentielle pour rétablir la confiance, garantir la transparence et assurer la croissance durable de cette filière stratégique pour l’économie togolaise.
Clarisse AFANOU
Photo: DR
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