Au Togo, malgré l’ouverture du pays à des religions étrangères, certaines ethnies sont encore réfractaires à la pénétration de la Bonne nouvelle. C’est ainsi que certaines contrées du Sud-Togo demeurent hermétiquement fermées. Les Bè, Aflao, Agoe-Nyivé…considérés comme les peuples autochtones et fondateurs de la capitale togolaise, Lomé, font partie des ethnies où le culte vaudou est prédominant.
Dan, Lègba, Kpeto deka, Sakpata…sont les principaux dieux adorés par ces ethnies. Leurs couvents sont répandus dans cette partie du pays. Certaines familles sont considérées comme les gardiens du temple ou les dépositaires du culte de ces vaudous. Des lignées sont consacrées à ces divinités auxquelles elles sont très attachées. Ces croyances se transmettent le plus souvent de père en fils. Il s’agit notamment des familles Dossou, Dantsomon, Zokpo, Zegbla, Sodjadan, Adadevi qui sont considérés comme les grands prêtres de ces divinités. Si nous prenons le cas par exemple de cette dernière famille qui est sur le tapis, depuis le décès du grand prêtre Sodjedo Adadevi, les tractations sont en cours pour la désignation de son successeur qui doit provenir selon les us et coutumes d’un de ses enfants. Mais ces héritiers avec le modernisme ne sont plus adeptes de ce culte et ne trouvent pas de bon œil ces pratiques qui consistent à sacrifier des animaux à des vaudous et à leur répandre du sang ou à verser des liqueurs par terre en signe de sacrifice. Mais les anciens ne l’entendent pas ainsi. Ils ne sont pas prêts à tolérer ce qu’ils considèrent comme des sacrilèges. Pour convaincre les enfants ils vont jusqu’à dire qu’ils ont consulté les oracles et que ceux-ci sont formels là-dessus, le successeur du grand prêtre Sodjedo Adadevi doit provenir d’un de ses enfants. Toute désobéissance équivaudrait à recevoir la foudre du dieu Sakpata.
Redoutant les mauvais sorts que leurs lanceraient ces vaudous en cas de rupture, les jeunes éprouvent encore des craintes à de se départir de ces liens. Ces craintes se nourrissent par la conception qu’ont les adeptes du culte du dieu Sakpata. Cette divinité inspire une terreur indicible chez ses adeptes au point qu’il leur difficile de prononcer son nom. En lieu et placé est substitué diverses périphrases comme Mè (sa majesté), Axossou (chef ou roi), Ayixossou (chef ou roi de la terre), Dokoun-non (richissime).
Cette crainte est aussi due au fait que le dieu Sakpata est généralement appelé le vaudou de la variole et des maladies contagieuses, mais il serait plus exact de l’appeler divinité de la terre : la variole n’étant que la punition infligée par elle aux malfaiteurs et à ceux qui lui ont manqué de respect. Sakpata peut être aussi source de mort.
Conséquence, il est difficile aux adeptes de rompre tout lien avec lui surtout si on est issu d’une famille consacrée à ces cultes comme c’est le cas des familles citées plus haut. La crainte des châtiments ou la foudre de ce dieu est vivace.
Cependant, certains franchissent le pas en prenant leur distance de ces divinités. Mais quand cela arrive, ils subissent les brimades et le bannissement jusque dans leur propre famille car ces dernières ne tolèrent pas et ne sont pas prêtes à accepter l’affront qu’un dès leur fasse en refusant de suivre la voie des ancêtres.
Dans pareil cas, si l’auteur de l’affront ne quitte pas la sphère d’influence de ces divinités il reçoit des attaques mystiques : il peut être victime d’un accident, d’un palu, de la variole ou de la mort subite qui l’emporte et dont la cause est inexplicable mais qui sont interprétées comme la punition des dieux.
Face à cette situation, seuls les téméraires franchissent le pas de la rupture.
Clarisse AFANOU
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