Togo : Vers un ‘’toilettage’’ du monument de l’indépendance ?
Le monument de l’indépendance construit par Sylvanus Olympio pour marquer l’accession de notre pays à l’indépendance à la suite d’âpres luttes, de sacrifices énormes consentis par nos aïeux particulièrement les femmes, ce monument, le plus important du pays, pourrait connaître, peut-être enfin, un « toilettage » ou une réhabilitation.
En effet, ce matin du jeudi 14 mars 2024, on peut observer un échafaudage monté autour de la structure en béton jusqu’à la hauteur de l’ouvrage. Que va-t-on faire ? Personne ne sait. Qui a initié les travaux ? On ne sait pas non plus. Mais on pourrait penser au District Autonome du Grand Lomé (DAGL), parce que très souvent, ce sont ses agents qui entretiennent le jardin et les plantes autour du monument et qui assurent la surveillance des lieux.
A cause de la haine viscérale pour Sylvanus Olympio et de son régime, ce monument a été abandonné à la nature pendant toute son existence, sans le moindre entretien. Avant le coup d’état du 5 février 2005, il n’y avait même pas de jardin autour dudit monument.
Pour faire semblant de séduire les Togolais à la suite des crimes de sang commis en avril – mai 2005 sur plus d’un millier de Togolais pour accaparer le pouvoir d’Etat, le régime actuel avait aménagé pour la première fois les alentours du monument en clôturant son périmètre avec une grille métallique ayant des accès fermés à clé. Un jardin y a été créé avec des ficus plantés et taillés périodiquement. Des passages cimentés y ont été aménagés. Un jet d’eau et une sorte de piscine dont le fond est peint du drapeau togolais y ont également été installés. On est même allé dans le saupoudrage pour ériger les bustes sculptés en béton des anciens présidents du Togo qui se sont succédé, notamment, ceux de Sylvanus Olympio, Nicolas Grunitzky, Kléber Dadjo et Eyadéma Gnassingbe.
Sur le même sujet : Monument de l’indépendance : Et si on lui donnait une couche de jouvence ?
La construction en béton elle-même n’a jamais été badigeonnée ne serait-ce que de barbotine ou de chaux vive, quoique sa paroi est prise d’assaut par les algues vertes qui ont séché sur les murs auxquels elles donnent une couleur noirâtre. Les bordures du bâtiment se cassent et tombent sous l’effet de la rouille dans le fer à béton utilisé dans la structure. La seule et unique partie du monument à avoir reçu du badigeon est la femme qui porte la calebasse dans laquelle la flamme est allumée. Pour la simple et bonne raison que c’est la seule partie utile pour le prince dans son devoir de ranimer cette flamme. La brise marine et l’humidité de l’air aussi contribuent à dégrader les bordures laissées à l’abandon.
C’est tout comme si on dit avoir réfectionné le bâtiment de l’Hôtel de la Paix en aménageant un joli jardin autour, et ironie du sort, on garde l’immeuble lui-même dans l’état de décrépitude avancé actuel, lequel est squatté aujourd’hui par des chauves-souris et des sans-domicile-fixe et autres vagabonds errants de Bè ! Voilà à quoi on pourrait comparer le monument de l’indépendance réfectionné par le pouvoir au lendemain du 5 février 2005 jusqu’à ce jour!
Sylvanus OLYMPIO est tellement détesté par le régime monarchique que si ce dernier avait la possibilité de démolir ce monument et de raser les lieux, il l’aurait fait depuis le temps de son assassin autoproclamé, lui-même passé de vie à trépas.
Et ce ne sont pas les tentatives essayées dans ce sens qui manquent. Au summum de sa gloire, le régime despotique du père avait supprimé l’hymne national, Terre de nos aïeux, pour le remplacer par l’hymne du RPT, une chanson fantoche qui a été imposée au peuple de 1979 à 1992. La devise avait été changée aussi. « Travail – Liberté – Patrie » avait été remplacée par « Union – Paix- Solidarité ». Les armoiries du pays avaient été défigurées et dénaturées, chacun utilisant ses armoiries à lui. Dans ses vaines tentatives d’effacer et de dégommer des annales de l’histoire les noms des vaillants, dignes et valeureux fils qui se sont sacrifiées pour la liberté du Togo, le pouvoir a également essayé de supprimer le drapeau togolais avant d’échouer et d’y renoncer. Il a fallu le soulèvement populaire du 5 octobre 1990 et ses suites pour que l’histoire et ces symboles intrinsèques soient remis en selle.
Les emblèmes et symboles d’une nation sont sacrées et intouchables. Tous les peuples qui respectent les attributs de leur souveraineté sont prospères et bénis. Ceux qui les ont foulés au pied sont miséreux et maudits. Vérifiez l’affirmation.
Un autre symbole est toujours royalement ignoré : ce sont les restes mortels de Sylvanus Olympio demeurés en terre étrangère depuis 61 ans. Tant que les restes du véritable père de l’indépendance et de la nation ne seront pas rapatriés pour recevoir les honneurs et hommages dus à son rang pour les loyaux services et le sacrifice suprême qu’il a consentis à ce peuple, tant qu’un mémorial ne sera pas érigé en sa mémoire comme c’est le cas par exemple au Ghana, pays civilisé qui l’a fait pour son libérateur Kwame NKRUMAH, ce pays ne se relèvera pas.
Faut-il le rappeler, la crise politique rampante togolaise n’est que la conséquence d’une situation. Il s’agit d’un rapport de force déséquilibré entre les successeurs de la liberté et de la souveraineté totale togolaise d’une part, et les successeurs de ceux qui à l’époque, avaient choisi la servitude volontaire.
L’échafaudage érigé autour du monument de l’indépendance pourrait servir de tremplin pour le régime en place pour se racheter et rétablir l’histoire de notre pays. Il n’est jamais trop tard pour bien faire. On espère seulement que ce n’est pas pour un saupoudrage en préparation du 27 avril habituellement marqué par la seule réanimation de la flamme de l’indépendance exécutée à contrecœur, à laquelle le peuple a droit à chaque 26 avril à 18 heures.
Francine DZIDULA
E-Mail: togoscoop@gmail.com
Tél : (00228) 90 96 63 64/ 99 56 57 88 : Pour vos reportages, annonces et publicité, contacter le service commercial de votre site Togoscoop.
