Le préfet de l’Avé, un démarcheur ?
Les accusations sont extrêmement graves. Le préfet de l’Avé, Awu Kossi, est accusé de saper la cohésion et le vivre ensemble au sein des communautés de ladite préfecture. Démarchage, entorse et intrusion dans des procédures judiciaires, kidnapping, soutien aux gros bras, recel…sont quelques-uns des griefs portés contre lui. Les pourfendeurs des abus du préfet ne sont que la collectivité Gbetsi et alliée qui reprochent au représentant du pouvoir central son rôle malsain dans le litige foncier les opposant à d’autres collectivités.
A première vue le nom du préfet ne devrait pas se retrouver dans un litige foncier opposant deux collectivités. Mais contre toute attente, il se retrouve être le principal accusé dans ce litige, le fauteur de trouble, celui qui, en sous-mains attise le feu par son mauvais rôle d’où les critiques acerbes qu’il reçoit pour quelqu’un qui doit être au-dessus de la mêlée et de surcroit le représentant du pouvoir central. Conséquence, son autorité est remise en cause comme il le confirme lui-même en disant qu’à plusieurs reprises il a adressé des invitations à ses administrés qui n’ont pas daigné, même pas en signe de respect à l’autorité qu’il incarne, honorer le rendez-vous.
Au prime abord, c’est un conflit qui oppose la collectivité Gbetsi à celle d’Adjivon sur le droit de propriété des parcelles de terres estimées à plus d’une centaine d’hectares. Alors que la justice a, dans un premier temps, donné raison à la collectivité Gbetsi et que les autorités coutumières (chef du village Koudassi-Gare et chef canton de Tovégan) aient reconnu la paternité de ladite collectivité sur ces terres, Galley Dodji, conseiller municipal Avé 1 allié aux Adjivon fait obstruction à l’exécution de la décision judiciaire. Ils se liguent avec le préfet pour dénoncer ce droit de propriété. C’est ainsi, que le préfet qui avait d’abord signé ce droit de propriété sous le règne de Togbui Galley III, chef du village de Koudassi aujourd’hui décédé, reviendra sur sa signature et intimera par ailleurs l’ordre aux gardiens des us et coutumes aussi de se dédire. Ceux qui ont voulu outrepasser ses ordres ont été purement et simplement démis de leur trône. Tels ont été le cas des régents du canton de Tovégan et du village de Koudassi-Gare démis de leur trône au début du mois.
« Lorsque nous avons porté ces suspensions des têtes couronnées au motif qu’ils nous reconnaissent le droit de propriété à la connaissance du Procureur de la République, celui-ci s’est offusqué en dénonçant une décision illégale estimant qu’il n’y a personne qui maitrise mieux que les chefs traditionnels les propriétés dans leur milieu », propos rapporté par Gbetsi Yawo, chef de la collectivité.
COUP BAS
Ce dernier ne comprend pas les raisons de l’inimitié que le préfet Awu Kossi lui voue à ce point concernant cette affaire. « Il ne m’a pas dit la raison de son hostilité à mon endroit », souligne-t-il avant de poursuivre : « Un jour, revenant du palais de justice, j’ai été intercepté par la voiture de commandement du préfet. A bord, le préfet lui-même. Celui-ci m’intima l’ordre de monter. Sur mon hésitation et mes interrogations, avec son chauffeur ils me menaçaient que si je n’exécute pas je ne pourrai pas imaginer ce qui m’adviendrait. Sur ce ils m’ont embarqué à la gendarmerie. Je ne savais pas qu’il avait donné l’ordre au CB de m’embastiller. Mais une fois partie, je serai libéré quelques jours plus tard par le CB qui ne comprenait pas les raisons de ma détention », raconte le septuagénaire.
Si le vieux Gbetsi ignore les raisons de l’immixtion du préfet dans ce litige, Toulassi Mensa, mandataire de la collectivité Tago a une petite idée sur les motivations du préfet. Pour ce pasteur d’église « les déboires des Gbetsi ont commencé depuis que le chef de cette collectivité, Gbetsi Yawo, a témoigné à notre faveur réaffirmant que les terres voisines appartiennent à mes aïeuls, les Tago. C’est depuis qu’ils se sont coalisés contre lui, que le mandat lui fut retiré, le même préfet qui a signé son mandat a renié sa signature », déclare l’homme de Dieu.
L’autre raison qui explique la position du préfet est, à en croire, le mandataire de la collectivité Tago, est qu’il est devenu un démarcheur : « le préfet est devenu le démarcheur de nos terres, des terres des Tago. Il fait les démarches des terres pour leur vente. Il est devenu un démarcheur. Il n’est plus préfet. Je ne sais pas pourquoi le gouvernement l’a oublié ici et il fait ses affaires au lieu de s’occuper de ceux pourquoi on l’a nommé ».
« Il a avoué à des gens que je l’ai « dupé » dans une affaire à Noepé c’est la raison pour laquelle il me le fait payer à Koudassi. Or, je ne sais quelle affaire lui et moi on a fait à Noépé. Le préfet ne travaille plus pour l’Etat mais il travaille pour ses propres intérêts. Il est devenu un business-man. Je ne sais pas si le gouvernement est informé ».
Propos corroborés par un natif du milieu qui affirme qu’« une fois le préfet m’a remis quelque chose (NDLR : fétiches) à aller déposer sur un terrain. J’ai des témoins et je confirmerai ces propos devant qui de droit, ce n’est pas pour le diffamer », déclare ce jeune pour qui ces événements arrivent à cette collectivité parce qu’elle est pauvre et n’a pas en son sein des hauts cadres. « Mais ils croient à la justice car, ils savent que leur la force viendra de-là ».
EXTORSION DE FONDS
L’autre nom qui revient souvent dans les magouilles foncières dans la préfecture est celui du chef de Hegbe, Togbui Hodogbe, également président du Comité de paix de l’Avé, il est souvent cité comme étant de mèche avec le préfet pour « escroquer » les propriétaires terriens.
« Il manigance pour qu’on arrête les gens, une fois fait, il contacte les familles pour dire qu’il va œuvrer à leur libération en soutirant à ces dernières des sous. Nous sommes dans un problème délicat dans l’Avé », confie le mandataire des Tago.
« Il m’a soutiré 70 000 F, pour, dit-il, œuvrer à ma ré-intronisation comme régent », avance le régent de Koudassi-Gare, démis de son trône. « Devant moi il a remis 20 000F à Doumon, le même montant au SG de la préfecture ; mais je ne l’ai jamais vu remettre l’argent au préfet », confie le régent Adjivon Kokou.
Le président du Comité de paix et le préfet sont imbibés jusqu’au cou dans plusieurs litiges fonciers. Ils ont leur pion qui vendent les terres et leur font des ristournes ce qui fait qu’ils ne souhaiteraient pas que les vrais propriétaires aient le droit de propriété sur ces terres sinon le pot-au-rose sera découvert, soutient la collectivité.
Contacté pour avoir leur version des faits, le préfet de l’Avé, Awu Kossi et le chef de Hegbé, Togbui Hodogbe, ne nient pas les faits. Cependant, ils affirment que la collectivité a fait du « faux et usage du faux » ce qui explique la caducité de leur « droit de bornage ». Ils contestent également la procédure qui a abouti à la signature du « droit de propriété » à cette collectivité et qui fait entorse à la procédure. Si tel est le cas pourquoi la justice n’interpelle pas les mis en cause puisque le « faux et usage de faux » et le refus de répondre aux convocations de l’autorité sont punis par la loi ? Réponse du préfet : « ils comptent sur vous (NDLR : les journalistes) ».
A la question de savoir s’il reconnait avoir séquestré le nommé Gbetsi Yawo dans sa voiture de commandement ? Le préfet piqué au vif sur un ton amer répond : « De tout ce que j’ai raconté là, rien ne vous fait peur dans le dossier et c’est le fait de le prendre dans ma voiture qui vous importe ? Je ne peux pas répondre ».
Appelé à la rescousse Togbui Hodogbe après avoir juré sur les mânes des ancêtres et sur Dieu que s’il est sur le mauvais chemin que ceux-ci lui barrent la route, a admis que sa seule préoccupation est le maintien de la paix et de la cohésion sociale au sein des communautés. Paix et cohésion sociale qui sont devenues son fonds de commerce, selon ses détracteurs.
Face à ce méli-mélo, il appartient à la justice de trancher en disant le droit, rien que le droit pour ne pas envenimer davantage la situation dans le village de Koudassi.
Albert AGBEKO
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Merci pour ces informations, c’est réellement ce qui se passe à Hekpe sur la collectivité Gbadago et Atikpo faites tout pour que cela cesse dans le canton