Microfinance au Togo : Une enquête révèle les attentes et défis des clients
L’Association Professionnelle des Systèmes Financiers Décentralisés du Togo (APSFD-Togo) a présenté ce jeudi 20 mars 2025 les résultats d’une enquête de satisfaction menée dans 23 marchés du grand-Lomé. Cette divulgation intervient en marge des célébrations du mois de la femme. L’événement a rassemblé plusieurs acteurs du secteur, dont Gabiam Kokou, Directeur général de la Coopérative de Crédit et d’Épargne du Commerce (COCEC) et Président du Conseil d’Administration de l’APSFD-Togo, ainsi que des représentants de la BCEAO et de la direction de la microfinance.
Une clientèle mature et majoritairement féminine
L’enquête démontre que 71,32 % des clients interrogés ont plus de 46 ans, tandis que seulement 2,69 % ont moins de 35 ans. Cette tendance souligne une prédominance des adultes matures et un faible attrait des jeunes des marchés pour les services de microfinance.
En ce qui concerne le genre, la disparité est frappante : 96,2 % des clients sont des femmes contre 3,8 % de hommes. Cette situation mettant en exergue une forte représentativité des femmes peut s’expliquer par divers facteurs socio-économiques, notamment leur rôle actif dans la gestion des petits commerces ou dans l’économie informelle dans les marchés.
Fidélité des clients et prépondérance du commerce
L’étude révèle que la majorité des clients utilisent les services de microfinance depuis plus de cinq ans, avec seulement 10,33 % de nouveaux utilisateurs. Cette fidélité constitue un atout pour la stabilité des institutions, mais soulève également des questions sur l’attractivité pour de nouveaux clients.
Les activités exercées par ces clients sont dominées par le commerce et les services, tandis que l’agriculture et l’artisanat restent sous-représentés. Cette tendance pourrait signaler un besoin d’adaptation des offres financières à ces secteurs moins couverts.
Critères de choix et utilisation des services
La proximité géographique est le principal critère de choix d’une institution de microfinance (90 % des répondants), bien avant la facilité d’accès au crédit (8,08 %) et les taux d’intérêt (0,96 %).
Les produits les plus sollicités sont les crédits (50 %) et l’épargne (45 %), tandis que les assurances et l’éducation financière sont peu utilisées (2 %). De manière alarmante, aucun des sondés n’a déclaré utiliser des services financiers digitaux, ce qui témoigne d’un retard important en matière de digitalisation.
Vers une modernisation et une inclusion accrue
Face à ces constats, plusieurs recommandations ont été formulées :
1. Inclusion des jeunes et des femmes : Création de produits adaptés à ces populations, avec des formations et des conditions de prêts avantageuses.
2. Digitalisation des services : Sensibilisation des clients et développement de solutions numériques comme le mobile banking.
3. Diversification des offres : Extension des services d’assurance et d’éducation financière.
4. Renforcement de l’accessibilité : Augmentation du nombre d’agences et simplification des procédures de crédit.
L’appel des clients : Un soutien accru des institutions
Dans son mot introductif, au début de la conférence, le président de l’APSFD-Togo, a insisté sur l’importance des microfinances pour les femmes entrepreneures, tout en reconnaissant les difficultés liées aux taux d’intérêt et aux délais de traitement des dossiers.
Parlant de l’enquête, M. Gabiam a déclaré il s’est agi de « cerner les ententes et les préoccupations des clients membres, identifier les facteurs qui influencent leurs satisfactions et leurs fidélisations, formuler des recommandations concrètes pour amélioration des services de microfinances en tenant compte des réalités du secteur informel et du commerce de détail ». Il s’est réjoui que les clients ont exprimé un bon niveau de satisfaction global notamment en ce qui concerne l’accueil dans les institutions, la propreté des lieux, la qualité des renseignements, toutefois leurs attentes portent particulièrement l’accès à des produits de crédits et d’épargne à long terme ainsi qu’à un meilleur accueil dans les caisses et au niveau des tontiniers et agents de crédit.
Ces résultats, a-t-il souligné, constituent un levier stratégique pour les IMF qui gagneraient à diversifier leurs services et à renforcer la proximité pour avoir la qualité relationnelle afin de mieux répondre aux besoins évolutifs de la clientèle majoritairement féminine et expérimentée.
Des clientes ont partagé leurs expériences :
Gbogbo Catherine : « Ces aides nous sont très précieuses. Ne disposant pas des moyens nécessaires pour lancer nos commerces et nos activités, nous pouvons compter sur ces institutions pour nous soutenir. Cela nous facilite grandement les choses. Grâce à leur appui, j’ai pu développer mon commerce. J’avais commencé avec 500 000 francs, et aujourd’hui, mon fonds de commerce s’élève à environ 1,5 million. Je ne contracte pas de gros crédits, seulement des montants de 200 000 ou 300 000 francs ».
Dadabor Adjo Elise, commerçante au marché d’Adidogomé : « Les solutions que nous attendons des institutions de microfinance concernent principalement la réduction des taux d’intérêt. De plus, après avoir accordé des crédits aux femmes, il arrive qu’elles traversent des périodes de difficulté financière. Dans ces moments-là, il est essentiel que les microfinances leur apportent un accompagnement et un soutien adaptés, afin de leur permettre de surmonter ces épreuves sans subir de pression excessive ».
En résumé, cette enquête met en avant une clientèle fidèle mais peu diversifiée, une forte dépendance à la proximité des agences et un retard dans la digitalisation des services.
L’événement se conclura par une caravane prévue le 29 mars 2025, visant à sensibiliser et promouvoir des solutions innovantes pour un secteur de la microfinance plus inclusif et adapté aux réalités des entrepreneurs togolais.
Albert AGBEKO
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