Le Togo est en phase transitoire, a affirmé le 12 juillet 2024 le ministre de la Fonction publique, du travail et du dialogue social, Gilbert Bawara. Une transition qui a commencé, selon ses dires, le 6 mai 2024, date de la promulgation de la nouvelle constitution de la 5ème République qui a basculé le pays dans un régime dit « parlementaire ».

A en croire le ministre, la nouvelle architecture institutionnelle doit être mise en place dans un délai de douze mois au maximum à compter du 6 mai 2024. Période au cours de laquelle on assistera à l’opérationnalisation des institutions et organes prévus par la nouvelle constitution, annonce-t-il.

C’est pourquoi, « nous sommes dans une logique de sensibilisation et de pédagogie envers tous les acteurs. Il est tout à fait logique que nous allions aussi vers certains partenaires techniques et financiers pour nous assurer qu’ils comprennent le contexte politique et institutionnel qui est en train de se mettre en place dans notre pays », a indiqué M. Bawara en rencontrant un certain nombre de responsables de médias.
Or, ce processus transitoire comme le dit le ministre, n’a pas été inclusif. Toutes les couches socio-politiques de la société togolaise n’ont pas été associées au processus transitoire. Le texte constitutionnel n’a pas été consensuel. Le peuple n’a pas été consulté à l’élaboration du texte constitutionnel. Le vote s’est fait en « catimini et nuitamment » au moment où le peuple dormait comme si on avait peur.
Or, dans une société juste et démocratique, il ne doit pas y avoir de place à l’exclusion. L’avis d’une partie de la population, aussi infime soit-il doit être pris en compte. Mais tel n’a pas été le cas dans ce processus conduisant à cette transition. Le peuple ne sait rien de cette transition. Il n’a aucune idée du chronogramme. Seuls quelques ‘’illuminés’’ maitrisent l’agenda qu’ils déclinent selon leur bon vouloir.
Quand on reconnait qu’une société est en faillite et qu’on veut la réformer, le bon sens voudrait qu’on tienne compte de l’avis de toutes les composantes de cette société pour repartir sur des bases saines afin d’éviter de faire de frustrés. Tel n’a pas été le cas dans ce processus conduisant à cette transition. Pire encore, il n’y a pas eu de place pour manifester son ressenti vis-à-vis de la façon dont la chose publique est gérée.
En 1991, quand il s’est agi de tourner la page d’un quart de siècle de régime à parti unique, c’est à la suite d’un débat national. La conférence nationale souveraine qui est la manifestation de cette volonté de changement de paradigme n’a pas exclu totalement les tenants de l’ordre ancien. Ils avaient droit à la parole, bénéficiaient du respect dû à l’adversaire politique et étaient présents dans les nouvelles institutions mises en place par la conférence. Pour preuve, le Président de la République Gnassingbé Eyadema a été maintenu à son poste même s’il a perdu certaines de ces prérogatives. Ce qui n’était d’ailleurs pas du goût de ses soutiens qui ont tout fait pour faire échouer la transition.
Qu’aujourd’hui, ces héritiers décident de changer de régime en ayant recours à la politique de l’exclusion, c’est comme on assiste à un bégaiement de l’histoire. Ceux qui hier accusaient de les avoir exclus, ce sont eux qui, à leur tour, excluent d’autres. La société togolaise ne doit pas se résumer en un duel permanent d’un camp sur un autre, à une revanche perpétuelle d’un camp sur un autre. A un moment donné, il faut que l’esprit de nation transcende toutes autres considérations. Il faut qu’à un moment donné, le Togolais aille vers la 43ème ethnie comme l’appelait de ses vœux Dahuku Péré.
En cela, il manque au Togo, cet homme providentiel capable de transcender les clivages pour aller vers ce Togo nouveau. La société togolaise n’est pas aussi clivée que celle sud-africaine à la sortie de l’apartheid. Mais il y a eu un homme, Nelson Mandela qui, a su réconcilier son pays en posant les bases d’une nation arc-en-ciel. Même après sa mort, le nom de Mandela résiste au temps et à l’espace. Aujourd’hui 18 juillet est commémoré partout dans le monde « Mandela day » en hommage à la contribution de ce grand homme à la promotion de la paix.
Mais le Togo manque cet homme de la trempe de Madiba. En 2005, bon nombre de citoyens togolais espéraient que Faure Gnassingbé joue ce rôle. Presque deux décennies de son règne, le fossé s’est élargi dans le pays. Même les recommandations de la Commission vérité-justice et réconciliation (CVJR), sur modèle sud-africain, que lui-même s’est engagé à mettre en œuvre ont été foulées avec ce changement de constitution.
Francine DZIDULA
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