

Vue d’une morgue (archives)

Une polémique est en train de naître sur la toile. Elle découle de la pose de la première pierre ce lundi, 4 octobre 2021, pour la construction d’une morgue dans le Yoto, environ 80km au nord-est de Lomé. Projet porté par la mairie Yoto 2 dont le Maire, Mme Adjra Yawavi, avait assisté à la cérémonie.
Aussitôt connu de l’opinion, ce projet suscite un tollé sur la toile. Les critiques ne comprennent pas qu’une ville (l’une des plus riches du pays en raison des ressources dont regorge son sous-sol mais très pauvre en infrastructure) qui n’a pas d’hôpital peut se permettre le luxe d’investir plus de 300 millions de nos francs dans la construction d’une morgue de 100 places alors que la population peine à se soigner surtout les femmes enceintes pour qui c’est la croix et la bannière pour des accouchements.
Certains ne sont pas surpris que le conseil communal de Yoto 2 ait décidé d’ériger une morgue au sein de la ville d’Ahépé au lieu d’un hôpital. « Avez-vous déjà oublié, il y a quelques années, en lieu et place de la rénovation du CHU Tokoin et de la construction d’un nouvel hôpital de référence demandées par les populations et les acteurs du monde de la santé, la réponse des autorités a été la rénovation et l’extension de la morgue du CHU Tokoin », rappelle un internaute pour qui, Madame le Maire, a donc « préféré disposer d’une morgue qui accueille leurs morts dans de meilleures conditions plutôt que de se voir offrir un hôpital qui sauve des vies! ».
« Comment peut-on construire une morgue de 100 places à 300 millions, au même moment on n’a pas un hôpital ni CMS de référence dans la commune », peste un natif de la commune. Pour ce dernier, les femmes quittent Ahépé, Zafi, Gboto, Amoussimé et autres localités de la commune pour une simple opération césarienne ou encore aller se soigner à Tsevié, car l’hôpital préfectoral de Tabligbo n’est pas bien équipé. « Aujourd’hui, on brandit la construction d’une morgue communale à hauteur de 300 millions de francs CFA comme un trophée de guerre, vous êtes sérieux là », déplore-t-il.
« A Yoto, nous n’avons rien malgré le calcaire qui enrichit la minorité et ses complices étrangers. Mais comme nous « savons » mourir, on va nous construire la morgue. Nooon! », débite un autre natif de la préfecture.
« Quand il n’y a pas d’hôpital, il faut naturellement des morgues. Aussi simple que ça… », trouve un autre.
Face à ces critiques, pour la Mairie de Yoto ce projet est celui d’un opérateur privé qui a répondu favorablement aux sollicitations des populations ; elle ne comprend pas ces critiques, des critiques qui décourageraient des opérateurs économiques qui voudraient investir dans la commune. Mais seulement la société Togo Sépulture (TOGOSEP) qui devrait construire la morgue n’a pas une existence numérique. A-t-elle au moins une existence réelle ? Ou s’agirait de la fameuse société indienne Ping-Pong Global dont le directeur général M. Siddharta Jain, reçu, en janvier 2018 par le président Faure Gnassingbé, en séjour en Inde promettait construire dans les deux ans à venir un hôpital de référence au Togo. Aujourd’hui, nous sommes en 2021, trois ans après cette promesse aucun hôpital n’est sorti sous terre. Mieux, on nous a promis un autre du nom de Saint Pérégrin, lui non plus, deux ans après, tarde à se concrétiser malgré les fanfaronnades. Comme les affaires mortuaires sont plus lucratives ici, les Yotolais, auront dans les six mois à venir leur morgue comme promis. Et là, ils peuvent mourir paisiblement.
Francine DZIDULA
E-Mail: togoscoop@gmail.com