Pour qui roule Yao Robert Daté ?

Depuis qu’il a été propulsé à la tête du Comité d’action pour le renouveau (CAR) dans des conditions que tout le monde connait, Robert Yawo Daté, est devenu l’homme dans les oreilles de qui le pouvoir souffle. En effet, on se souvient que c’était lui qui avait lors d’une réunion du Cadre permanent de concertation (CPC) émis l’idée de 117 députés à l’Assemblée nationale, en raison d’un député par commune.  L’idée avait enchanté et fait briller les yeux de certaines autres formations dites de l’opposition, a aiguisé leur appétit et a semblé faire son bonhomme de chemin.

Depuis que le CPC est créé c’est une première fois qu’une proposition venant de l’opposition est passée comme une lettre à la poste au point qu’on dise qu’un projet de loi serait déposé sur la table des députés dans ce sens.

Auréolé par l’accueil réservé à sa proposition, Daté revient à la charge quelques jours plus tard avec une autre proposition : il faut reporter les élections prévues cette année en les renvoyant à l’année prochaine et ceci en organisant des élections générales. Mais avant cela, il suggère la mise en place d’un cadre inclusif pour, dit-il, approfondir les discussions en vue d’atteindre un consensus national.

« J’ai été séduit en 2010 au Ghana, lorsque j’ai supervisé, en tant qu’observateur, les élections, et c’est là que j’ai constaté que ce sont des élections générales. Je me suis alors dit : c’est bien. J’ai échangé alors avec les organes de gestion des élections, et c’est là où j’ai compris les avantages qu’il y a dans l’organisation des élections générales », soutient le président du CAR.

Un argument qui surprend plus d’un venant de la part d’un haut responsable politique. S’il lui a fallu attendre 2010 et ceci en tant qu’observateur électoral pour se rendre compte que le régime politique ghanéen (le régime présidentiel calqué sur le modèle américain) est différent du nôtre, il y a de quoi faire réfléchir. C’est une question de régime politique. Avec notre régime politique vouloir organiser des élections générales sans changer de régime sera quelque peu difficile car notre régime donne la latitude au président de la République de dissoudre le parlement au besoin. Si la dissolution intervient on ne va pas attendre sans parlement jusqu’à la prochaine présidentielle pour organiser à nouveau des élections générales.

De ce fait, ce que propose le président du CAR est une réforme du fond en comble de notre système politique, de notre gouvernance et si on s’y lance ce n’est pas si sûr qu’on va finir avant la fin du mandat de l’actuel locataire du palais de Lomé 2.

Ce débat aurait pu avoir lieu il y a quelques années lorsque l’opposition parlait des réformes institutionnelles, constitutionnelles et politiques. Si le pouvoir ne leur avait pas fermé la porte au nez, ça devrait être une belle occasion de discuter également du régime politique qui sied bien à notre pays en tenant compte de nos réalités. Mais on en a fait une question de survie. Finalement, c’est le statu quo qui demeure.

Par ailleurs, depuis 2010 que le président Daté a fait ce constat au Ghana, il a attendu plus d’une décennie avant de faire sa proposition. Certainement attendant d’être élu à la tête de son parti d’abord. Pourquoi tout ce temps d’hibernation ? Lui seul sait. Toujours est-il que faire une telle proposition en ce moment où les acteurs politiques parlent beaucoup de conditions d’organisation de scrutin législatif et régional et que le gouvernement a déjà fixé la date de ces élections ressemblerait à une volonté de détourner l’attention des gens. Par conséquent, on en conclurait que le CAR de Robert Daté joue un jeu trouble.

Albert AGBEKO

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