Éducation au Togo : Quand la note du ministre Kokoroko se heurte à la réalité du terrain

En octobre 2023, le ministre des Enseignements primaire, secondaire et technique, Prof. Dodzi Komla Kokoroko, signait une note circulaire (N° 025/2023/MEPST/CAB/SG) imposant le respect strict de la durée normale du cursus scolaire au Togo : six ans pour le primaire, quatre pour le secondaire 1 et trois pour le secondaire 2. L’objectif affiché ? Préserver l’équilibre psycho-éducatif des élèves, lutter contre le surmenage et garantir une éducation progressive et structurée.

Un système scolaire à double vitesse entre réglementation rigide et pratiques contradictoires

Mais deux ans plus tard, c’est le même ministère qui publie, avec emphase, l’âge des plus jeunes candidats aux examens nationaux : 8 ans pour le CEPD et 13 ans pour le BEPC. Des âges qui, selon sa propre réglementation, ne permettent pas un cursus complet et conforme. Alors, comment expliquer cette dissonance entre les textes et la réalité ?
Des exceptions devenues la norme ?
La note ministérielle mentionne une dérogation possible uniquement pour les « élèves surdoués », avec un encadrement spécifique. Pourtant, les cas récents laissent croire à une tolérance de fait, voire à une valorisation implicite de ces parcours accélérés. Dans les faits, des élèves passent d’une classe à l’autre à un rythme effréné, souvent au mépris des étapes intermédiaires jugées nécessaires pour leur développement.
En mettant en avant ces enfants comme de véritables trophées de guerre éducatifs, le ministère semble fouler aux pieds sa propre doctrine, au risque de décrédibiliser les fondements de sa politique.
La pédagogie sacrifiée au profit de l’image ?
Comment comprendre qu’un ministère qui prône la rigueur éducative et le respect du rythme des enfants se félicite, dans le même temps, de résultats obtenus grâce à des raccourcis scolaires manifestes ? Cette communication paradoxale envoie un message ambigu à la communauté éducative et aux parents d’élèves : faut-il respecter les règles ou viser la performance à tout prix ?
Les enseignants et directeurs d’école, eux, sont pris dans un étau : entre le respect de la circulaire et la pression des familles ou des supérieurs hiérarchiques, les contournements se banalisent, alimentant une forme d’anarchie pédagogique.
Un système en mal de cohérence
Cette contradiction flagrante révèle un problème plus profond : l’écart entre les décisions administratives et les dynamiques du terrain. Au Togo, le système éducatif souffre d’un manque de lisibilité et de cohérence. Quand l’autorité ministérielle change de cap selon les circonstances, comment assurer une éducation stable et équitable ?
Il est urgent que le ministère clarifie sa position : soit il tient fermement à la régulation des cursus, soit il revoit les textes pour mieux encadrer les cas dits « exceptionnels », en toute transparence. La crédibilité de l’autorité éducative en dépend.
Francine DZIDULA
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