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Trafic de sang à l’hôpital Saint Joseph de Datcha : l’OPS-Afrique interpelle le ministre de la santé à démanteler le réseau

Après le trafic de médicaments, c’est sur le sang humain à transfuser aux malades que le personnel hospitalier du Togo a jeté son dévolu. Le cas préoccupant est celui intervenu à la fin du mois de septembre 2024 à l’hôpital Saint Joseph de Datcha dans la préfecture de l’Ogou et rapporté par l’Observatoire pour la Promotion de la Santé en Afrique (OPS-Afrique) dans une note adressée au ministre de la Santé et de l’hygiène publique. Dans cet hôpital et certainement dans bien d’autres, les agents se livrent à la surenchère, créent la pénurie artificielle pour escroquer, extorquent abusivement des fonds aux patients, conservent le sang dans des conditions douteuses en vue de procéder à la vente illicite, … Ces pratiques saignent les populations et écartent bon nombre des soins de qualité, dénonce l’Observatoire pour la Promotion de la Santé en Afrique (OPS-Afrique) qui a saisi le ministre de la santé à faire la lumière sur ces agissements de son personnel et à sanctionner les fautifs conformément à la loi.

Nous vous proposons la correspondance adressée au ministre de la santé par l’Observatoire…

 

Réf /N°…. / 09-2024/OPS/PR                                Lomé, le 03 octobre 2024

 

Le Président National                                          A

Monsieur le Ministre de la Santé et de l’Hygiène Publique

 

Objet : Saisine

Monsieur le Ministre,

L’Observatoire  pour la Promotion de la Santé en Afrique (OPS-Afrique) se réjouit de votre nomination à la tête de ce département vital auquel toutes nos vies dépendent. En vous félicitant pour cette confiance méritée de la part des autorités togolaises, l’OPS-Afrique vous souhaite plein succès dans cette mission.

Monsieur le Ministre, nous voudrions porter à votre connaissance une situation d’extrême gravité de trafic illicite de sang au sein de l’hôpital Saint Joseph de Datcha.

En effet, un enfant de 6 ans a été admis dans ledit hôpital le 31 Août 2024 au service de la pédiatrie. Selon le parent de l’enfant que nous avons rencontré, l’infirmière au poste a référé l’enfant vers le CHR-Atakpamé pour  anémie grave. A la sortie de l’hôpital, il a été intercepté par un autre  infirmier du même centre qui l’avait conduit cette fois-ci à la chirurgie. Après le sérum, l’infirmier est revenu avec une poche de sang avec laquelle l’enfant a été perfusé. Il informe ensuite  le parent  qu’une poche de sang coûte 15.000F, ce que le parent a payé sans reçu. Un autre infirmier est  venu à son tour demander la deuxième poche et le parent  lui a versé encore 15.000F, toujours sans reçu. La troisième poche fut encore demandée le 02 septembre 2024. Cette fois-ci, l’infirmier dit au parent qu’il ira à Sokodé pour lui acheter le sang. Mais le parent totalement bouleversé, s’est confié à un de nos membres qui l’a instruit de se rendre au CHR-Atakpamé pour s’informer. Il croise curieusement ce même  infirmier au CHR –Atakpamé qui est allé  aussi  acheter du sang. Le parent  achète la  poche du sang à 6000F.

Beaucoup de questions restent posées dans cette situation. Pourquoi l’infirmier n’avait-il  pas dirigé le parent au CHR-Atakpamé s’il sait que le sang est disponible dans cet hôpital ? Pourquoi a-t-il dit au parent  qu’il irait à Sokodé alors que le sang est disponible à Atakpamé et devrait s’y rendre ? Nous précisons qu’il était couvert de honte et déstabilisé quand il a aperçu le parent.

Notre première hypothèse émise dans cette pratique peu orthodoxe, est le commerce illicite : « achat et revente du sang d’autrui ».

Nous l’avons contacté pour comprendre ce qui explique ce  prix très élevé des poches de sang qu’il a vendues. Il  nous fait savoir que la première poche est livrée par son collègue et nous informe que ces deux poches de sang sont le reste d’une patiente qui les avait achetées lors de son opération.

Son collègue qui a servi la première poche nous dit à son tour  qu’il a utilisé la poche par urgence  avant de contacter la dame à qui appartiendraient les poches. C’est cette dernière qui a fixé avec fermeté ce montant de 15.000F par poche en incluant les frais de son déplacement sur Lomé où elle les avait  payées. Ces propos venant d’un infirmier nous surprennent puisqu’une poche pédiatrique coûte 3.500F. Interrogé sur le moyen d’envoie des fonds perçus,  il nous dit qu’il  a remis la somme  à son collègue (celui qui a servi la deuxième poche). Ce dernier a reconnu avoir encaissé les fonds qu’il a envoyés à son tour  à la dame « propriétaire du sang ». Nous avons cherché à avoir le contact de cette dame pour vérifier les faits mais hélas ! Sur insistance, l’infirmier nous dit par un message ceci : « je n’ai pas enregistré malheureusement son numéro, c’était écrit sur une feuille qu’on a jeté après transaction. ».Cette réponse nous surprend et confirme les pistes de fraude.

Même si l’enfant va bien  aujourd’hui, nous nous interrogeons beaucoup sur cette pratique qui saigne les populations et écarte bon nombre aux soins de qualité. Si les arguments avancés par ces infirmiers sont vrais  (ce que nous doutons fortement), alors  pourquoi n’ont-ils pas mis le parent en contact avec la dame pour discuter directement  du prix ? Pourquoi ont-ils encaissé l’argent eux-mêmes alors que la loi le leur interdit formellement ? Pourquoi la dame devrait-elle commercialiser le reste du sang en  calculant les frais de son déplacement sur les deux poches afin de tirer largement profit ? Le sang est-il devenu un objet de commerce pour avoir des démarcheurs (infirmiers) ?

Monsieur le Ministre, cette version servie par les infirmiers  est le moyen frauduleux utilisé dans beaucoup d’hôpitaux où l’on constate malheureusement  que le prix d’une poche de sang varie d’un centre à un autre. Un vol déguisé à interdire systématiquement.

En  poursuivant nos investigations nous apprenons que l’aide laboratoire de cet hôpital  serait celle qui conserve  le sang pour le revendre cher avec la complicité de la directrice de l’hôpital. Elle disposerait des poches de sang même à son domicile dans le village Avétè ; information que nous vous prions, Monsieur le Ministre de vérifier par vos canaux appropriés pour sauver nos populations car elles questionnent sur les conditions de conservation de ce produit vital. Pour s’assurer qu’elle dispose des poches de sang,  nous avons mené nos enquêtes. Sans nous renvoyer vers une structure compétente, elle nous informe qu’elle connait quelqu’un à Lomé qui est un vendeur potentiel quand il y a pénurie. Ce dernier achète du sang aux nécessiteux  et  revend les restes en cas d’urgence entre 14.000 et 15000F. Dix minutes plus tard elle nous rappelle et nous demande de passer pour la livraison.

Lire aussi : CHU Kara : Un vaste réseau de trafic de médicament met en danger la vie des patients

En voulant savoir combien coûte concrètement la poche elle précise que si nous sommes dans l’urgence d’apporter 15.000F (preuve que nous détenons).Cette version est claire que le commerce du sang est bien établi. Nos sources nous renseignent également  que cette pratique illicite  est courante et bien organisée par un réseau de la direction.

Pour preuve, un autre parent que nous avons contacté à  l’Est mono a aussi payé une poche dans ce même hôpital à 15000F le 26 Août 2024.

Pendant toutes nos investigations l’infirmier ayant encaissé l’argent nous demandait de contacter la directrice car dit-il, « nous  agissons sous les ordres de la directrice. Si elle nous demande de perfuser nous perfusons. C’est elle qui nous avait demandé de ramener  l’enfant à la chirurgie quand il était référé par la pédiatre vers le CHR-Atakpamé ». Après nos échanges avec cet infirmier, nous avons reçu un coup de fil de la directrice. Toute furieuse, elle nous  demande de passer à son bureau si nous avons besoin des informations. Elle n’était pas surprise d’apprendre que ces agents vendent du sang et n’a manifesté aucune indignation.

Nous nous convenions de la contacter après nos démarches pour un  rendez-vous. Quelle ne fut pas  notre surprise de la voir une seconde fois très agressive avec des mots déplacés quand nous l’annoncions notre disponibilité pour ce rendez-vous. Elle nous reproche cette fois-ci d’avoir obtenu son numéro de téléphone sans son accord pourtant c’est sur ce numéro qu’elle avait donné sa disponibilité pour nous recevoir  à tout moment « même à minuit », nous avait-t-elle dit. Ce comportement regrettable que nous dénonçons et considérons  comme une tentative d’intimidation démontre sans doute que ce réseau de trafic illicite de produit sanguin, opèrerait sous son onction en violation de l’article 552 de code de la santé : « La transfusion sanguine s’effectue dans l’intérêt du receveur et relève des principes éthiques du volontariat, du bénévolat et de l’anonymat du don ainsi que de l’absence de profit, dans les conditions définies par le présent livre. »

Monsieur le ministre, ces faits ainsi relatés prouvent à suffisance qu’il existe un réseau de trafiquants qui stockent le sang et créent  la pénurie afin de se faire de l’argent sur le dos des pauvres populations. Cette activité illicite et illégale interdite par nos lois notamment le code de la santé en son article 551  « le trafic du sang humain et de ses dérivés sont  interdits »,expose dangereusement  nos populations. Nous sommes curieux de savoir qu’un centre confessionnel qui devrait venir en aide aux plus démunis est celui qui extorque ces populations vulnérables.

C’est pourquoi nous vous prions en toute urgence, d’user de vos prérogatives pour investiguer et  démanteler ce réseau afin d’arrêter le massacre et d’attirer l’attention du Centre National de Transfusion Sanguine pour veiller à ce trafic des agents véreux et cupides qui ont entrainé sa contractualisation. Nous exigeons en outre que les sanctions prévues aux articles 560 du code de la santé publique : « Est puni d’une amende de cinq cent mille (500.000) à cinq millions (5000.000) de francs CFA et d’une peine d’emprisonnement de six (06) mois à trois  (03) ans ou de l’une  de ces deux peines seulement, quiconque fait trafic du sang d’autrui ou de produit d’origine humaine », soient appliquées dans leur rigueur aux personnes et  complices qui se rendraient coupables de ce trafic.

Nous restons entièrement disponibles à fournir tous les éléments de preuve dont vous aurez besoin pour la manifestation de la vérité afin que ces comportements cessent dans nos hôpitaux.

Comptant sur votre engagement pour la défense, la promotion  et la protection des droits des patients, je vous prie d’agréer, Monsieur le Ministre de la Santé et de l’Hygiène Publique, l’expression de mes profondes considérations.

 

Ampliation

-Ministre de l’Accès Universel aux Soins

-CNTS

-CNDH

 

                                                                               AGOUZOU Aklèsso

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