

Payadowa Boukpessi
Voilà une délibération qui risque d’envenimer encore plus les relations quelque peu tendues entre la Commune Golfe 4 et le ministre de l’Administration territoriale et du développement des territoires. En effet, après avoir outrepassé l’injonction du ministre de tutelle Payadowa Boukpessi demandant aux communes de surseoir aux adressages des rues, avant le décret d’application de la loi sur la décentralisation, le conseil municipal Golfe 4 a, non seulement procédé à de nouvelles dénominations des artères de son ressort territoriale mais encore mais a encore retiré la gestion de certains marchés installés sur son territoire communal et qui sont jusque-là gérés par l’Etablissement public autonome pour l’exploitation des marchés de Lomé (EPAM).
Va-t-on assister dans les jours à venir à des empoignades entre des agents de collectes de taxes envoyés par l’EPAM dans les marchés de Gbossimé et d’Adawlato avec ceux de la commune Golfe 4 ? L’hypothèse n’est pas à exclure. Sans le règlement du différend qui oppose les deux entités devant une juridiction compétente, le tribunal administratif, compétent à connaitre cette affaire ou sans que le bon sens ne prévale, cette possibilité n’est pas à exclure, avec tout ce qu’elle peut comporter comme atteinte à la cohésion sociale et au vivre ensemble.
SUFFRAGE UNIVERSEL ET NOMINATION
En effet, à l’issue de la session communale tenue du 14 au 30 juin 2022, le conseil de Golfe 4 a décidé de soustraire les marchés d’Adawlato et de Gbossimé de la gestion de l’EPAM. En clair, cet établissement public où le ministre de l’Administration territoriale est également président du conseil d’administration ne pourra plus collecter les taxes dans lesdits marchés. Désormais, si cette délibération est appliquée, ce sont les agents de Golfe 4 qui, procéderont à cette collecte. Ce qui constituera une véritable manne financière pour cette commune quand on sait que le grand marché de Lomé comme son nom l’indique est le plus grand du Togo et donc en termes de recettes est loin devant les autres marchés du pays.
Pour prendre une telle décision, le conseil municipal de la commune s’est fondé sur les dispositions de l’article 82 de la loi sur la décentralisation relative aux compétences propres aux communes. Il en conclut qu’en laissant l’EPAM gérer ces marchés, il empiète sur les prérogatives dudit article et qu’aux termes de l’article 7 de la Loi N°2019-006 du 26 juin 2019 relatif à la décentralisation et aux libertés locales « les collectivités territoriales ont pour mission la conception, la programmation et l’exécution des actions de développement d’intérêt local de leur ressort territorial, en particulier dans les domaines économique, social et économique et culturel. Elles définissent leur politique de développement local et les priorités de financement des projets relevant de leurs domaines de compétences ». Se fondant sur cet article, pour Golfe 4 c’est à elle que revenait le droit de la perception des taxes dans les marchés en question.
Pour le conseil municipal Golfe 4, l’existence même de l’EPAM est une violation de la loi sur la décentralisation. Pour Golfe 4, l’EPAM qui a été créé par un arrêté de l’ancienne commune de Lomé devrait disparaitre avec celle-ci et ses actifs remis aux nouvelles collectivités territoriales. Face à cette anomalie, le Maire du Golfe 4 a eu à adresser une correspondance au ministre de tutelle lui demandant d’annuler l’arrêté municipal créant l’EPAM. Mais au lieu de l’annulation demandée, le maire reçoit le 21 mars 2022 du ministère « l’arrêté N°0030/MATDDT en date du 24 février 2022 portant transfert du patrimoine matériel et immatériel de l’ancienne commune de Lomé non transféré aux nouvelles communes du Golfe, au District autonome du grand Lomé » avec en tête de liste de patrimoine transféré au District autonome du grand Lomé (DAGL), l’EPAM. Un transfert qui, pour Golfe 4, est l’aveu de l’arbitraire puisque l’article 316 de la loi sur la décentralisation précise : « le transfert des biens de l’Etat aux collectivités territoriales, est décidé par décret en conseil des ministres, soit à la requête de ces collectivités territoriales, soit sur l’initiative de l’Etat lui-même ».
Or, en transférant l’EPAM au DAGL, le ministère reconnait implicitement que la commune Golfe 4 a raison de poser le problème de l’EPAM, entité indépendante ne relevant d’aucune commune.
L’EPAM, entité indépendante, piétine non seulement sur les plates-bandes des communes nouvellement créées mais encore le ministère lui accorde la primauté par rapport aux communes qui sont pourtant élues. Cette primauté de l’EPAM sur les mairies procède essentiellement de la double casquette du ministre de l’Administration territoriale qui assure la tutelle des collectivités locales dans le même temps préside le conseil d’administration de l’EPAM qui gère les marchés. Ce qui explique la position du ministre d’empêcher les maires d’initier des projets qui contrarieraient éventuellement ceux, plus lucratifs, de l’EPAM.
Ainsi, c’est pour éviter la persistance des conflits entre l’EPAM et la commune Golfe 4 que l’arrêté retirant les marchés à la gestion de l’EPAM a été pris. Mais ce que Golfe 4 veut éviter en adoptant cette mesure risque de se produite d’une manière ou d’une autre si les divergences ne sont pas aplanies. D’où il urge que la justice soit saisie pour trancher la divergence.
Francine DZIDULA
E-Mail: togoscoop@gmail.com
Tél : (00228) 90 96 63 64/ 99 56 57 88 : Pour vos reportages, annonces et publicité, contacter le service commercial de votre site Togoscoop.