Guy Marius Sagna : « Dès que vous parlez du Président Faure Gnassingbé vous disparaissez mystérieusement de la surface de la terre africaine »
La conférence de presse du député sénégalais, membre du parlement de la CEDEAO, Guy Marius Sagna vient de prendre fin à Dakar. Le député Sagna est largement revenu sur son agression à Lomé au Togo.
Nous vous proposons des extraits de son intervention…
« Ce dont j’ai été victime en même temps que 19 autres Togolais, c’est ça qui est l’ordinaire. C’est ça qui est l’ordinaire des citoyens Togolais au Togo. Ils sont bastonnés tous les jours, leur droit piétiné, leur liberté écrasée.
Tous les jours, personne n’ose dire le plus petit mot contre les politiques du Président-Dictateur, Faure Gnassingbé parce que dès que vous le dites, vous disparaissez de la surface de la terre africaine mystérieusement. Parce que dès que vous dites le plus petit mot pour critiquer non pas le Président mais ses options politiques et économiques, vous êtes emprisonnés. On m’a même dit quand j’étais à la clinique il y a un imam togolais qui faisait son prêche et qui disait dans son prêche « mais inspirez-vous du Sénégal », depuis ce jour-là, l’imam est en prison.
C’est dramatique, c’est tragique, c’est le quotidien de nos frères et sœurs du Togo. Et moi, député Sénégalais, on dit que je ne dois pas écouter les Togolais me raconter ça ?
On dit que je ne dois pas aller au Togo pour rencontrer mes frères et sœurs du Togo que je représente au parlement de la CEDEAO. Vous trouvez ça normal ? On dit que si moi, député de la CEDEAO, je les écoute et que j’en parle, c’est de l’ingérence.
Mais alors supprimez le parlement de la CEDEAO. Et vous comprenez alors pourquoi depuis le début de la CEDEAO, le Parlement de la CEDEAO est inconnu. Les députés de la CEDEAO sont choisis dans les assemblées nationales. Ils ne sont pas élus directement par le peuple.
Vous voyez en Europe, une fois je crois tous les 4 ans ou tous les 5 ans, je ne sais pas, vous entendez qu’il y a les élections européennes. Moi depuis que je suis petit, j’entends les élections européennes.
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Des différents pays, membres de l’Union Européenne, qui élisent directement, qui un jour, un dimanche, vont voter pour choisir leur représentant au Parlement Européen. Mais nous là, ici, au niveau de la CEDEAO, ce n’est pas nous qui choisissons, ce n’est pas vous qui m’avez choisi directement. Vous m’avez choisi indirectement.
Le régime du Togo, la police togolaise, le gouvernement togolais veulent se focaliser sur moi. Mais moi, ma santé ne m’intéresse pas. C’est la santé du peuple togolais qui m’intéresse. Parler des coups et des blessures que j’ai reçues ne m’intéresse pas. Ce qui m’intéresse, c’est les coups et les blessures quotidiens reçus par le peuple togolais.
Les Togolais qui osent dire ce qu’ils pensent, ils sont en exil. Le peu qui reste au Togo, c’est la prison, c’est les pressions, c’est les disparitions. C’est les coups, c’est les tortures. C’est ça la situation.
Voilà ce qui s’est passé le 29 septembre dernier. Mais, chers frères et sœurs, quand j’étais à Abidjan il y a quelques semaines, la présidente du parlement m’a appelé pour me dire que le président de l’Assemblée nationale de Côte d’Ivoire va vous recevoir demain à 11h. Madame la présidente, je n’ai pas demandé à rencontrer le président de l’Assemblée nationale de Côte d’Ivoire ?
Je ne comprends pas pourquoi est-ce qu’il veut me rencontrer alors que moi, je n’ai pas demandé à le rencontrer.
Et pendant 12 heures de temps, j’ai subi des pressions immenses pour que j’accepte d’aller m’asseoir avec le président de l’Assemblée nationale de la Côte d’Ivoire. Donc, la présidente du parlement de la CEDEAO se bat, se mobilise pour que je rencontre le président de l’Assemblée Nationale de Côte d’Ivoire et maintenant que moi je veux rencontrer des citoyens du Togo, on me l’empêche ? Vous trouvez ça normal ? Et je lui ai dit, Madame la Présidente, vous avez facilité une rencontre entre moi et le président de l’Assemblée Nationale de Côte d’Ivoire, rencontre que je n’ai pas demandée, rencontre que je n’ai pas voulue, rencontre que je n’ai pas souhaitée.
Et aujourd’hui qu’il y a des Togolais qui souhaitent me rencontrer, et moi je souhaite les rencontrer, vous vous y opposez. Vous me dites que des rencontres même privées, des rencontres publiques comme privées, mais la loi togolaise a décidé comment elle doit se passer. Il faut informer, il faut demander une autorisation. Ça veut dire que quand une famille au Togo veut manger à midi, c’est une réunion, il faut demander, il faut informer le gouvernement du Togo. Non mais, vous voyez un peu jusqu’où les dictateurs poussent l’absurde, une réunion privée, la présidente du parlement de la CEDEAO, parce qu’elle est togolaise, parce qu’elle est chez elle, parce qu’elle est membre du même parti que le président de la République et qu’elle a reçu des pressions, elle me dit je tiens à le dire clairement.