Togo : L’Index mondial de la torture pointe un risque considérable de violations des droits humains

Le lancement officiel de l’Index mondial de la torture le 25 juin 2025 intervient dans un contexte marqué par de vives tensions au Togo. Les manifestations citoyennes des 26, 27 et 28 juin ont en effet été émaillées d’allégations de traitements inhumains et dégradants, soulevant de nouvelles préoccupations sur la situation des droits humains dans le pays.

Un outil inédit pour mesurer et prévenir la torture

Conçu par l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT) en collaboration avec 90 organisations de la société civile dans 26 pays, l’Index mondial de la torture est une initiative pionnière destinée à évaluer les risques et réalités de la torture dans le monde. Cet outil s’appuie sur 400 indicateurs pour offrir un diagnostic détaillé de la situation par pays.
À Lomé, les organisations membres du réseau SOS-Torture Togo — le CACIT, le CDFDH et l’ACAT-Togo — ont organisé, le 27 juin, une rencontre d’échanges avec des leaders d’opinion togolais. Objectif : sensibiliser et renforcer l’appropriation de l’Index, avec un accent particulier sur la lutte contre la torture fondée sur le genre.
Le Togo classé « à risque considérable »
Dans cette phase pilote en Afrique, sept pays ont été évalués : quatre sont classés à risque très élevé, deux à risque élevé, et le Togo figure dans la catégorie « risque considérable ». Une position jugée préoccupante mais moins alarmante que celle de pays comme la RDC, le Cameroun ou la Libye.
« L’Index évalue non seulement le risque de torture, mais aussi la conformité des cadres juridiques nationaux à la Convention contre la torture », a expliqué Guy Valère Badanaro, juriste et coordinateur du programme régional Afrique du CACIT.
Selon lui, cette analyse permet de dégager les principales failles du système national de prévention de la torture et d’activer les leviers nécessaires au changement.
La répression des récentes manifestations pourrait-elle aggraver la note du Togo dans les prochaines éditions de l’Index ? Pour M. Badanaro, il est trop tôt pour se prononcer : « Un événement ponctuel ne suffit pas à faire basculer un classement. Ce sont les tendances sur la durée, les actions concrètes et les manquements répétés qui influencent l’évaluation globale ».
Trois recommandations prioritaires pour le Togo
L’Index formule trois recommandations majeures pour les pays évalués, dont le Togo :
- Renforcer la conformité juridique avec la Convention contre la torture, notamment par l’application effective des textes existants.
- Améliorer les conditions de détention, particulièrement la surpopulation carcérale et la détention préventive prolongée.
- Renforcer les mécanismes d’enquête et de réparation, afin que les victimes puissent obtenir justice et que les auteurs ne restent pas impunis.
Des engagements pris… mais une application encore limitée
Malgré la ratification du Protocole facultatif à la Convention contre la torture (OPCAT) et l’intégration de la torture dans le code pénal togolais, l’application des textes demeure marginale. Les auteurs d’actes de torture continuent d’échapper aux poursuites.
Fait notable : la Cour de justice de la CEDEAO a condamné le Togo dans six affaires de torture sur les 29 plaintes déposées par des citoyens togolais. Une statistique qui reflète l’écart entre les engagements internationaux du pays et leur mise en œuvre effective.
Le classement du Togo à un niveau de risque considérable doit être pris au sérieux par les autorités au moment où des allégations de torture sont signalées et pour lesquelles les organisations de défense des droits de l’Homme appellent à des enquêtes indépendantes. La lutte contre la torture exige des réformes structurelles, un engagement politique fort et la mise en place de mécanismes de prévention, de protection et de réparation efficaces. L’Index mondial de la torture est désormais un outil incontournable pour évaluer ces efforts et faire avancer les droits humains au Togo.
Albert AGBEKO
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